• Les tentatives de l'Allemagne nazie visant à déployer par sous-marin des équipes de saboteurs, durant la Seconde guerre mondiale, se sont révélées des échecs cuisants. En voici un bref récit.

    Pendant les premiers mois de la guerre, la contribution majeure des Etats-Unis pour s’opposer aux Nazis concernait la production industrielle d’équipements et leurs livraison aux forces armées se défendant activement contre la machine militaire allemande. Cet effort industriel était assez fort pour générer une frustration voire même une indignation parmi le Haut Commandement nazi et l’ordre fut donné, prétendument par Hitler lui-même, de produire un sérieux effort afin de réduire la production américaine.

     

    Les renseignements allemands établirent que le sabotage était le moyen le plus efficace pour ce genre d’opération. Le lieutenant Walter Kappe, rattaché à l’Abwehr-2 (Renseignements-2) qui avait passé quelques années aux Etats-Unis avant la guerre et qui avait été un membre actif dans l’organisation ‘German American Bund’ devint responsable du projet. Kappe était aussi un membre du ‘Ausland Institute’ qui avant-guerre, enrôlait les allemands de l’étranger dans le NSDAP (Nazionalsozialistiche Deutsche Arbeiterpartei) ou parti nazi. Durant le conflit, Kappa resta en contact avec les membres revenus de l’étranger et plus précisément ceux de retour des Etats-Unis.

     

    Des saboteurs rapidement capturés


    Début 1942, il contacta parmi d’autres ceux qui prendraient part finalement à la mission aux Etats-Unis. Tous acceptèrent la tâche, apparemment de bonne volonté, bien qu’ils n’étaient pas au courant de leur travail spécifique. La plupart des saboteurs furent sortis de la vie civile alors que deux d’entre eux servaient alors dans l’armée allemande. Les recrues, environ douze personnes au total, furent informées de leur mission spécifique uniquement lorsqu’elles entrèrent à l’école de sabotage de Berlin qui leur permit de connaître la chimie, les incendies, les explosifs et détonateurs, les codes secrets ainsi que l’usurpation d’identités et de racines américaines. L’entraînement intensif consista également à l’utilisation de ces diverses techniques en conditions réelles.

    Plus tard, les saboteurs visitèrent des usines d’aluminium et de magnésium, des chemins de fers, des centrales hydrauliques et d’autres installations afin de se familiariser avec les endroits vitaux ainsi que la vulnérabilité des cibles à attaquer. Des cartes furent utilisées pour situer les cibles américaines contenant les points où les voies de chemin de fer pourraient être le plus efficacement mises hors service, les usines principales d’aluminium et de magnésium ainsi que les canaux et les voies fluviales importantes. Toutes ces indications devaient être mémorisées par les saboteurs.

    Le 26 mai 1942, le premier groupe de quatre saboteurs quitta le port français de Lorient par sous-marin et le 28 mai, le second groupe partit du même endroit. Ces deux vagues devaient arriver à des endroits précis de la côte atlantique américaine connus par les leaders de chaque groupe. Le 13 juin 1942 à 0010, quatre hommes menés par George Dasch débarquèrent sur une plage près de Amagansett dans le comté de New York. Le 17 juin, le deuxième groupe débarqua sur la plage de Ponte Vedra en Floride.

    Les deux groupes débarquèrent vêtus complètement et partiellement d’uniformes allemands, pour être assuré d’un traitement en tant que prisonniers de guerre plutôt que d’espions, en cas de capture lors du débarquement. Après un débarquement sans encombres, les uniformes furent rapidement enterrés avec le matériel de sabotage (destiné à être récupéré plus tard) et des habits civils furent revêtus. Les saboteurs se dispersèrent rapidement.

    Le groupe de Floride se rendit à Jacksonville, puis par train jusqu'à Cincinnati avec deux personnes en direction de Chicago et l’autre paire en direction de New York City. Le contenu des caisses récupéré de l’endroit où elles avaient enterrées, c’est-à-dire sur une plage au sud de Jacksonville en Floride, comprenait des capsules électriques explosives, des mécanismes de retardement en forme de stylos et de crayons, des détonateurs, des ampoules d’acide et d’autres dispositifs de retardement.

    Le groupe de Long Island fut moins chanceux, à peine eurent-ils enterrés leurs équipements et uniformes, qu’un officier des gardes-côtes qui patrouillait le rivage s’approcha. Il n’était pas armé et fut très soupçonneux en les rencontrant mais encore davantage lorsqu’ils lui offrirent un pot-de-vin pour qu’il oublie la rencontre. Le garde accepta l’offre afin d’endormir la méfiance des saboteurs et reporta immédiatement le cas à son quartier général. Cependant, avant que la patrouille de recherche n’atteigne l’endroit, les nazis avaient rejoint une gare et avaient pris le train pour la ville de New York.

    L’engagement de George Dasch en tant que saboteur pour la mère patrie vacilla. Il pensa peut-être que le projet tout entier était aussi grandiose que peu pratique et il voulut se protéger avant que ses compagnons ne soient atteints des mêmes doutes. Dasch expliqua à son camarade Burger, son désir de confesser leurs intentions. Le soir du 14 juin 1942, Dasch, donnant le patronyme ‘Pastorius’ contacta le bureau new-yorkais du FBI en expliquant qu’il était arrivé récemment d’Allemagne et qu’il appellerait le quartier général du FBI à Washington à son arrivée dans la ville, la semaine suivante. Le matin du vendredi 19 juin, un appel de Dasch, descendu dans un hôtel de Washington, fut reçu par le QG du FBI. Il fit allusion à son précédent appel en tant que ‘Pastorius’ (le QG avait été avisé) et il indiqua où il se trouvait. Il fut immédiatement contacté et emmené pour détention.

    Pendant les jours suivants, Dasch fut minutieusement interrogé et il fournit l’identité des autres saboteurs, l’endroit probable où ils se trouvaient ainsi que des indications qui permettraient de les appréhender plus rapidement. Les trois membres restant du groupe de Long Island furent interceptés dans la ville de New York le 20 juin. La première paire du groupe Floride fut arrêtée à New York le 23 juin et les deux saboteurs restants furent appréhendés le 27 juin à Chicago. Les huit hommes furent jugés du 8 juillet au 4 août 1942, devant une Commission militaire composée de sept officiers de l’armée américaine désignés par le président Roosevelt. Le procès fut tenu dans un bâtiment du Département de la Justice à Washington. Les huit saboteurs furent reconnus coupables et condamnés à la peine capitale. Le procureur général et le directeur du FBI firent appel auprès du président Roosevelt afin de modifier la sentence de Dasch et de Burger.

    Dasch fut finalement condamné à 30 ans d’emprisonnement et son compagnon Burger reçut une peine de prison à perpétuité dans un pénitencier fédéral. Les six autres saboteurs furent exécutés dans la prison du District de Columbia le 8 août 1942. Les huit hommes étaient tous nés en Allemagne mais ils avaient aussi, pendant une période substantielle, vécu aux Etats-Unis. Burger avait été naturalisé en 1933. Haupt était arrivé comme enfant et avait gagné sa citoyenneté américaine lorsque son père fut naturalisé en 1930. Dasch rejoignit l’armée à l’âge de 14 ans et servit pendant 11 mois comme employé de bureau à la fin de la 1ère guerre. Il fut enrôlé par l’armée américaine en 1927 et renvoyé honorablement après un peu plus d’une année de service. Quirin and Heinck était retourné en Allemagne avant l’éclatement de la deuxième guerre mondiale en Europe. Les six autres agents rentrèrent en Allemagne entre le 11 septembre 1939 et le 7 décembre 1941, apparemment avec le sentiment de loyauté auprès de leur terre de naissance.

    Les interrogatoires d’après-guerre du personnel allemand et l’examen des rapports confirmèrent qu’aucunes nouvelles tentatives de débarquer des saboteurs par sous-marin n’avaient été organisées ; bien qu’en 1944, deux personnes, William Curtis Colepaugh and Eric Gimpel, furent débarquées sur la côte du Maine d’un sous-marin allemand avec pour but une tentative plutôt désespérée d’espionner et de collecter des informations. Eux aussi furent appréhendés rapidement par le bureau fédéral (FBI) avant d’avoir accompli leurs missions. En avril 1948, le Président Truman accorda la clémence à Dasch et Burger à condition qu’ils soient déportés dans leur pays. Ils furent emmenés dans la zone américaine en Allemagne où leurs peines furent suspendues sous certaines conditions. Plus tard, Dasch et Burger furent libérés.


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  • Utilisées depuis le XIXe siècle avec des résultats variables, les bombes sont devenues l'une des armes traditionnelles de la terreur.

    Les engins explosifs peuvent être tactiques, c'est-à-dire chercher à atteindre des objectifs ponctuels et limités, comme l'élimination d'une personne précise, ou une embuscade contre une patrouille militaire. Ils peuvent également être stratégiques et chercher à entretenir un climat général de terreur, à démontrer une capacité à conserver l'initiative ou simplement des capacités opérationnelles. Plus que la taille, c'est l'objectif qui détermine le caractère tactique ou stratégique d'une bombe.


    Il est également possible de " transformer " une bombe tactique en un engin stratégique. En Irlande du Nord, par exemple, on a fréquemment engagé des bombes en deux temps: une première bombe de faible puissance explose faisant quelques blessés, dans un second temps, lorsque les curieux et les forces de sécurité se sont rassemblées à l'endroit de l'explosion, une seconde bombe de plus grande puissance est déclenchée, causant encore plus de victimes. Le Hezbollah, au Sud-Liban, utilise aussi cette technique, en dirigeant la première explosion contre une patrouille israélienne, et une seconde explosion contre ceux qui lui viennent en aide.


    En Irlande du Nord, a été développée la pratique dite de " l'attentat par procuration ". Dans ce cas la bombe est posée par un individu contraint et sous chantage. Une variante de cette technique est de dissimuler un engin stratégique dans un véhicule à l'insu de son propriétaire.


    Envois piégés

    Les lettres et colis piégés ont été utilisés par l'IRA, quelques mouvements palestiniens, et le Mossad israélien, pour ne mentionner que les campagnes les plus connues. Une place particulière dans ce domaine est occupée par UNABOMBer qui a perpétré au moins 16 attentats entre 1978 et 1996.

    Malgré leurs faibles dimensions, les envois piégés peuvent le plus souvent être catégorisés comme stratégiques. L'expédition d'envois piégés " tous azimuts " et ne visant pas une personne en particulier a le plus souvent pour objectif de faire pénétrer l'insécurité dans la sphère intime des individus, et s'inscrit donc dans un contexte stratégique. C'est l'exemple des envois de lettres piégées par Septembre Noir en 1970 à différents organes officiels israéliens. Les envois étant le plus souvent ouverts par des secrétaires ou du personnel subalterne, l'objectif d'une telle campagne est davantage de créer un climat de terreur que d'éliminer une cible particulière.

    Il en est tout autre de la longue campagne d'UNABOMBer qui visait des personnes spécifiques et qui était organisée de sorte à atteindre la personne visée, souvent des membres du monde académique, à leur domicile. Il s'agit ici d'attentats qui pourraient être qualifiés de tactiques s'ils s'inscrivaient dans le cadre d'une lutte avec des objectifs stratégiques clairs. En l'occurrence, l'auteur était un psychopathe.

    Peut être qualifiée de tactique la campagne de lettres piégées adressées aux offices américain et londonien du journal saoudien al-Hayat en décembre 1996 et janvier 1997 (en tout 16 lettres ont été expédiées à divers destinataires).


    Lettre piégée (janvier 1997)

    Souvent les envois piégés sont détectables par la qualité de l'enveloppe ou de l'emballage, par des lieux d'origine insolites ainsi que par des adresses mal orthographiées. Le libellé de l'adresse est un indice, mais non un critère absolu. L'expérience montre que les terroristes sont souvent cultivés et maîtrisent souvent parfaitement des adresses complexes.

    Les mécanismes de déclenchement se sont raffinés. Des déclencheurs mécaniques de Septembre Noir, on est passé au déclencheurs électriques du Mossad dans les années 80, au déclencheur utilisant des cartes de Noël électroniques contre le journal al-Hayat en 1997.

    Véhicules piégés et véhicules-bombes

    Les véhicules piégés sont le plus souvent des engins tactiques. C'est essentiellement l'occupant du véhicule qui est visé.

    Les véhicules-bombes peuvent être utilisés comme moyen tactique, ou comme moyen stratégique. Dans ce dernier cas, l'explosion ne vise pas une personne en particulier, mais une foule ou des installations. Lorsque le véhicule-bombe est utilisé en embuscade, c'est la nature de la " cible " qui donne à l'attentat son caractère tactique ou stratégique.

    La tentative d'attentat contre José Aznar, le 19 avril 1995, a les caractéristiques d'un attentat " tactique ", mais par la nature de l'objectif, il s'agit bien d'un attentat de type stratégique.

    Certains groupes terroristes se sont spécialisés dans la fabrication d'engins explosifs sophistiqués. C'est le cas de l'IRA Provisoire, de l'ETA basque et du Hezbollah au Sud-Liban.



    Les engins explosifs sont souvent utilisées comme moyen d'embuscade. Il s'agit alors le plus souvent d'attentats de type tactique. Sous sa forme la plus simple - mais également la plus aléatoire - on utilise des mines antichars.

    L'exemple le plus célèbre d'embuscade à l'explosif est sans doute l'attentat contre l'amiral Luis Carrero Blanco, avec 100 kg d'explosifs dissimulés sous la route à partir d'un tunnel creusé clandestinement durant de longues semaines.


    Suivant l'exemple de l'IRA, le Hezbollah a développé depuis 1993 des bombes activées par radio. Il s'agit essentiellement de bombes placées sur le côté de la route et mises à feu lors du passage d'une patrouille. Probablement conçues et fabriquées en Iran, ces bombes sont essentiellement de l'explosif coulé dans une enveloppe de fibre de verre ayant la forme et la couleur d'un rocher, et muni d'un dispositif de mise à feu par radio.

    Dans un premier temps, les forces de sécurité (tant en Ulster qu'au Sud-Liban) ont pu, par exploration électronique, déterminer les fréquences de déclenchement des bombes, et ainsi faire exploser prématurément bon nombre d'entre-elles. Le Hezbollah a rapidement équipé ses bombes d'un système de codage rendant plus difficiles les contre-mesures israéliennes, puis les bombes ont été équipées de systèmes d'allumage à saut de fréquence rendant encore plus complexe les opérations de mise à feu prématurée par les forces de sécurité. Aujourd'hui les convois israéliens au sud-Liban sont accompagnés de véhicules de brouillage électronique afin de perturber les émissions radio du Hezbollah.

    En Irlande du Nord, l'IRA a également été mis au point un système de mise à feu déclenché par les émission radio de la police.


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  • Les actions des forces spéciales de la coalition en Irak, par définition, sont rarement rendues publiques. Le spécialiste des questions de défense pour le Daily Telegraph, Sean Rayment, a eu accès à une action directe menée en juillet dernier.

    Dans un petit matin estival, quelques heures avant que le trafic ne remplisse les rues, une patrouille de 16 hommes du SAS a pris des positions d’embuscade autour d’une maison de Bagdad.

    Les soldats avaient été informés que cette maison était utilisée comme base d’attaque par les insurgés, et que jusqu’à 3 terroristes préparant des attentats suicides devaient la quitter plus tard dans la matinée.


    Vêtus de vestes explosives, ils étaient entièrement équipés pour frapper un certain nombre d’emplacements dans la ville. Les cibles des terroristes étaient probablement des cafés et des restaurants fréquentés par des membres des forces de sécurité irakiennes. Le renseignement était considéré comme « très sûr » et provenait d’un agent irakien qui avait été traité par des membres du service de renseignement extérieur britannique, également connu sous le nom de MI6, pendant plusieurs mois.

     

    Unité binationale clandestine


    Les attentes étaient hautes parmi les 16 soldats attachés à la Task Force Black (TFB), une unité secrète de forces spéciales américaine et britannique basée dans la capitale irakienne. Chacun des 4 hommes formant l’un des 4 groupes était un vétéran de nombreuses missions dont les renseignements étaient prometteurs – et qui n’ont pas mené à grand chose. 

    Cette unité compte un escadron du 22e régiment du Special Air Service, des membres du 1er détachement opérationnel de forces spéciales Delta, ainsi que d’autres éléments militaires issus des deux armées, et utilise les renseignements fournis par les espions irakiens contrôlés par la CIA et le MI6. Spécialisée dans les opérations clandestines, elle est l’une des rares unités de la coalition à avoir la mission spécifique de cibler les auteurs d’attentats suicides.

    Le plan de l’opération Marlborough était simple : permettre aux 3 terroristes présumés de quitter la maison et d’aller dans la rue, puis de les tuer d’une balle dans la tête avec 4 équipes de snipers. Chacune était composée d’un tireur d’élite, utilisant un fusil de précision L115A au calibre .338 [soit 8,6 mm, NDT] capable de tuer jusqu’à 900 mètres, d’un observateur et de deux hommes assurant la sécurité rapprochée.

    Les soldats, en contact plus tôt avec leurs commandants, avaient considéré l’option de pénétrer dans la maison pour tuer les terroristes, mais ce plan avait été jugé trop dangereux. L’enceinte de la maison aurait intensifié l’impact de toute explosion et tué tout le monde à l’intérieur.

    Les membres du SAS savaient qu’il était vital de tuer simultanément les trois terroristes. Si l’un d’entre eux avait la possibilité d’actionner son détonateur, de nombreuses personnes pouvaient être tuées ou blessées.

    Les équipes clandestines de snipers avaient comme appui une force de réaction rapide (QRF), qui en cas d’urgence fournirait une dizaine de soldats supplémentaires en l’espace de quelques minutes. La QRF était basée dans un emplacement sûr à proximité, et une équipe d’officiers techniques spécialistes des munitions était à disposition pour désamorcer les bombes. Une section de la police irakienne était également attribuée pour l’opération, sans être briefée sur les détails de l’attaque, pour traiter tout problème de foule.

    Pendant ce temps, 600 mètres au-dessus de la cité et de ses 5 millions d’habitants, un drone Predator contrôlé par la CIA fournissait un flux vidéo en temps réel au quartier-général de la TFB, située au fond de la « zone verte » sécurisée.

    Peu après 0800, des traducteurs arabisants, surveillant les systèmes d’écoutés cachés dans la maison, ont averti le centre d’opérations que les terroristes étaient sur le point de faire mouvement. Le message « stand by, stand by » fut envoyé aux 4 équipes.

    Lorsque les terroristes sont arrivés dans la rue, une rafale de coups retentit et les trois hommes s’affalèrent au sol. Chaque terroriste avait été tué d’une seule balle dans la tête – les tireurs d’élite avaient passé les jours derniers à répéter l’embuscade dans le moindre détail. Les membres du SAS avaient été avertis que seul un tir à la tête garantirait l’absence de toute détonation. Seules 3 des 4 équipes de snipers ont ouvert le feu, la quatrième faisant office de remplacement au cas où l’une des armes s’était enrayée, ou si une équipe avait perdu de vue sa cible.

    Le message que les terroristes avaient été tués fut envoyé au quartier-général, et les soldats se sont avancés pour vérifier l’état des corps. En s’approchant prudemment, il devint brutalement clair que la balle au calibre .338 – la plus grande utilisée par l’armée britannique dans un fusil – avait fait son travail.

    L’opération Marlborough a été jugée un succès total, et l’une des rares occasions durant laquelle la coalition a été capable de porter un coup décisif contre des terroristes suicidaires.


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  • Si la vérité est l'une des premières victimes de la guerre, le secret est l'une de ses premières exigences. Un bon exemple de cet adage n'est autre que l'unité commando d'élite du Canada, qui est si discrète que les autorités canadiennes hésitent même à la qualifier comme telle. Mais les Etats-Unis connaissent bien la Force opérationnelle interarmées 2 (FOI 2) du Canada, et ils ont été tellement impressionnés par ses performances en Afghanistan qu'ils ont demandé son engagement pour toute campagne en Irak.


    La FOI 2 est constituée de volontaires provenant des trois branches des Forces armées canadiennes. Elle a été formé en 1993 en reprenant les missions contre-terroristes de la police montée royale canadienne ; ses effectifs sont censés s'élever à 350 membres, et elle est basée au centre d'entraînement de Dwyer Hill, dans une région rurale à l'ouest d'Ottawa.

    Le budget annuel de la FOI 2 est fixé à 25 millions de dollars canadiens, bien que le Ministre de la Défense John McCallum espère l'augmenter. La moyenne d'âge des commandos de la FOI 2 est de 28 ans, et ces hommes d'expérience sont reconnus comme spécialistes du combat par temps froid, grâce à leur entraînement intensif dans l'Arctique canadien.

     

    Expérience en Afghanistan


    Les membres de ces forces spéciales canadiennes sont sélectionnés et entraînés aussi rigoureusement que d'autres formations d'élite dans le monde, y compris le Special Air Service (SAS) britannique et la Force Delta américaine. Les exigences pour ces deux unités s'appliquent probablement aussi à la FOI 2, ce qui signifie qu'un quart des volontaires – des soldats de première ordre – sont habituellement rejetés, et qu'un dixième de ceux qui continuent incorporent finalement l'unité d'élite.

    Ce genre de formation est destiné à agir discrètement et avec une force mortelle dans des points chauds proches ou éloignés. Ses hommes sont entraînés à descendre d'une corde à partir d'un hélicoptère, à opérer isolément pendant des mois ou à rompre la hanche d'un combattant par un coup de pied au fémur. Ils devraient jouer un rôle vital dans une éventuelle campagne en Irak, spécialement dans des combats de rues à Bagdad.

     
    En raison du mutisme des autorités canadiennes, l'essentiel de ce que nous savons de la valeur de la FOI 2 provient de sources américaines. Pendant la campagne d'Afghanistan, la FOI 2 faisait partie d'un groupe de forces rassemblant des forces spéciales de 7 nations différentes, la task force K-Bar ; celle-ci a pris part à 42 missions de reconnaissance et de surveillance, ainsi qu'à des opérations que les militaires américains décrivent comme de "l'action directe". Les membres de la FOI 2 ont participé à des opérations commando qui ont capturé 107 chefs taliban et tué au moins 115 combattants des Taliban ou d'Al-Qaïda, le tout sur une période de 6 mois.


    Les opérateurs de la FOI 2 ont conduit l'escalade d'une montagne en Afghanistan pour atteindre un poste d'observation à haute altitude. Ils ont également fouillé des caves à la recherche de forces ennemies et de renseignements. Dans le cadre de l'opération Anaconda, qui s'est déroulée en mars 2002, les commandos canadiens ont pris position sur les sommets afghans pour renseigner les unités de combat en contrebas.

    Les hommes de la FOI 2 ont opéré conjointement avec les SEALs de la Marine américaine et avec les SAS australiens. Le commandant Kerry Metz de la Navy, en charge des opérations pour la TF K-Bar, a loué la performance des commandos "étrangers" durant une audition au Congrès. "Nous avons eu la chance d'avoir les meilleurs opérateurs d'une coalition de sept nations", a déclaré Metz. "Nous les avons mis au défi d'effectuer des missions dans certains des environnements les plus hostiles que nous ayons connus. Par exemple, nous avons engagé des équipes de reconnaissance dans les montagnes afghanes au-dessus de 3000 mètres, sans aucun ravitaillement pendant des périodes prolongées."

    Avant cela, la seule référence directe aux actions de la FOI 2 en Afghanistan était une photographie embarrassante, montrant des commandos escortant sur un tarmac des prisonniers d'Al-Qaïda. Elle déclencha un tumulte parlementaire et une enquête pour savoir pourquoi le Ministre de la Défense de l'époque, Art Eggleton, n'avait pas immédiatement informé le Premier-ministre Jean Chrétien que la FOI 2 était impliqué dans la capture de prisonniers en Afghanistan.


    Engagement au Kosovo


    Scott Taylor, éditeur du magazine Esprit de Corps, a déclaré que la FOI 2 est aussi performante que la Force Delta américaine et le SAS britannique. Certains observateurs estiment que la FOI 2 a été déployée pendant un certain temps au Kosovo, afin de découvrir des objectifs importants et d'utiliser des pointeurs laser pour guider des bombes intelligentes.

    Lorsque le député conservateur David Price a déclaré à la Chambre des Communes que la FOI 2 était au sol durant la campagne du Kosovo, le gouvernement a vivement nié pareil engagement – mais il s'agit d'une réponse gouvernementale obligatoire pour toute opération clandestine, et une autre réponse aurait pu mettre en danger la vie des opérateurs. La FOI 2 a presque certainement été déployée dans la ville de Québec, en avril 2001, comme réserve durant les violentes protestations qui ont accompagné le Sommet des Amériques.


    Quant à son action en Afghanistan, Scott Taylor affirme que "c'est exactement un rôle pour eux. Ces gars en veulent. Ils sont prêts à mener des opérations spéciales clandestines. Ils sont prêts à risquer leur vie sur le terrain. Chacun de ces gars s'est engagé dans ce but."

    David Rudd, de l'Institut canadien des études stratégiques, a déclaré à CBC News que les soldats de la FOI 2 ne s'entraînent pas à prendre une portion de terrain et à la tenir. "Ce qu'ils font, c'est s'infiltrer derrière les lignes ennemies, rechercher des objectifs-clés et les détruire. Ils ne sortent pas pour arrêter des gens ou distribuer de la nourriture. Ils sortent pour abattre des cibles."


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  • La Seconde guerre mondiale en Europe était vieille d'une semaine lorsque l'armée française traversa la frontière et entra en Allemagne. Le 7 septembre 1939, la grande crainte des généraux allemands d'une guerre sur deux fronts semblait s'être réalisée. Il apparaissait inconcevable que les Allemands puissent efficacement contrer la puissante armée française avec la Wehrmacht complètement engagée en Pologne.

    Alors que les bombardiers en piqué Ju-87 Stuka décollaient pour de vertigineux plongeons sur des objectifs polonais, le général français Maurice Gamelin ordonna à ses Troisième, Quatrième et Cinquième armées de commencer l'opération Sarre. Les armées françaises s'avancèrent dans les saillants de Cadenbronn et de la frontière de Wendt, la où la frontière allemande s'enfonçait en France. Des unités légères de reconnaissance traversèrent la frontière le 7 septembre, suivies deux jours plus tard par des forces lourdes d'infanterie et mécanisées.

     

    Une offensive devenue promenade

    De manière surprenante, il n'y eut absolument aucune réponse des Allemands, et les fantassins passèrent devant des positions ennemies vides. La Ligne Siegfried tant vantée semblait abandonnée. Malgré ses débuts agressifs, l'intrusion française en Sarre se transforma en une telle promenade que les soldats et fonctionnaires allemands eurent le temps de rassembler leurs affaires et de partir bien avant les légions de Gamelin. Dans d'autres secteurs de chaque côté de l'incursion française, les fonctionnaires allemands et français habituels bavardaient par dessus leurs barricades routières en bois comme si de rien n'était. Malgré la déclaration de guerre, des villes frontalières en France continuaient à recevoir un approvisionnement ininterrompu en électricité en provenance de stations électriques allemandes. La nouvelle guerre en Europe, apparemment, était loin de l'horrible massacre de la Première guerre mondiale 25 ans plus tôt.

     


    En traversant les villages allemands, les poilus trouvaient d'étranges affiches où figuraient des messages tels que "Soldats français, nous n'avons aucune dispute avec vous. Nous ne tirerons pas à moins que vous le fassiez." Au lieu de projectiles d'artillerie hurlants, les Allemands déversèrent sur les lignes françaises des messages de propagande avec des fourgons équipés de haut-parleurs ou érigèrent des panneaux d'affichage portant des messages de paix et de bonne volonté.


     
    A l'allure d'un escargot

    Les soldats français reçurent toutefois des accueils plus mortels. Pendant leur paisible repli, les Allemands saturèrent la zone frontière avec des explosifs. Des champs étaient minés, des portes étaient piégées et certaines enseignes nationales-socialistes sur les murs abritaient des explosifs cachés. Le moindre indice d'un obstacle explosif suffisait à stopper l'avance française à l'allure d'un escargot pendant des jours. Dans un cas, le général Gamelin ordonna personnellement à des soldats de dégager un passage à travers un champ de mines soupçonné en lançant un troupeau de porcs à travers. La rapide succession des détonations et le carnage qui en résulta ne fit rien pour encourager les soldats à s'avancer plus profondément dans le Reich.

    Le 9 septembre, deux divisions motorisées, cinq bataillons de chars et de l'artillerie étaient rassemblés dans un fraction de territoire allemand occupé. En dépit d'une puissance de feu écrasante, la plupart des forces de Gamelin restaient en vue du territoire français. Leurs tanks, lorsqu'ils étaient employés, étaient engagés dans de petits raids de compagnie sur des points d'appui ou des casemates inoccupées, à la frontière allemande, pendant que des VIP de France observaient à distance de sécurité.

     

    La doctrine blindée française

    En 1939, l'armée française possédait parmi les meilleurs chars au monde. Dotés d'une mécaniques solide et puissamment armés, ils avaient un blindage plus épais que celui de n'importe quel char allemand et des équipages bien entraînés. S'il y avait un seul défaut dans la doctrine blindée française, il était lié aux principes d'engagement des chars. Dépourvus d'entraînement dans les manœuvres de chars à grande échelle, les Français tendaient à employer leurs blindés dans des attaques par petits paquets, sans coordination avec l'infanterie, l'artillerie et l'aviation.

    Dans les rares exemples où les chars français se traînèrent à travers la frontière à portée des canons ennemis, les obus antichars allemands de 37 mm rebondissaient sans effet sur le blindage des Chars B-1 bis de 33 tonnes. Les chars français répliquèrent avec leurs canons de 47 mm sur tourelle à haute vélocité ou de 75 mm sous casemate. Les échanges isolés, toutefois, s'achevaient généralement par un match nul. Les Allemands disparaissaient et repositionnaient leur canons de petit calibre pendant que les charistes français se retiraient derrière une ligne protectrice d'infanterie. Ces escarmouches mirent en lumière une faille dans la conception des blindés français : le Char B-1 bis avait ses ouvertures de radiateur sur le côté, à un point où un impact d'obus antichar de petit calibre pouvait mettre le char hors combat.


     
    La faiblesse de la Wehrmacht

    Si le service de renseignements militaire français avait su qu'aucun panzer ne leur faisait face, la situation aurait pu être différente. Non seulement il n'y avait aucun blindé chenillé allemand à l'ouest du Rhin, mais en plus la Wehrmacht ne possédait aucune arme antichar capable de rejeter une invasion de blindés. La plus forte défense allemande s'avéra être les actualités filmées du blitzkrieg, qui intimidèrent et trompèrent les services de renseignement français.

    A l'opposé de la propagande nazie prétendant à un potentiel militaire sans limite, l'armée allemande manquait d'équipements de combat. Ses unités étaient spectaculairement à court de mitrailleuses, de fusils d'assaut, d'artillerie et de chars. L'arme blindée tant vantée ne comptait qu'à peine 200 chars moyens Mark IV – le char plus moderne dans les stocks allemands – équipés de canons de 75 mm à basse vélocité. Le reste de la force comprenait des chars légers Mark II produits à la hâte et équipés de canons de 20 mm ou de mitrailleuses en tourelle, et même des Mark I faiblement blindés et armés de deux mitrailleuses. Conçus pour l'entraînement jusqu'à ce que des modèles plus lourds soient disponibles, ces chars légers étaient au mieux adaptés à des reconnaissances mécanisées. Le temps que des unités blindées puissent rapidement faire la navette jusqu'au front occidental, les Français auraient déjà pu occuper la Rhénanie.

    La pénurie de transports motorisés en Allemagne amena la Wehrmacht à se procurer en dernière minute des véhicules de toutes tailles et de tous genres. L'acquisition hâtive de 16'000 véhicules supplémentaires accrut le fardeau de la maintenance. De nombreux véhicules provenaient des territoires récemment annexés, l'Autriche et la Tchécoslovaquie. Le problème de l'obtention des pièces de rechange pour les camions prit des proportions cauchemardesques, puisqu'il y avait en service dans l'armée 100 différents types de camions, 52 modèles de voitures et 150 sortes de motos. En conséquence, de nombreuses formations de reconnaissance de la Wehrmacht chevauchaient des side-cars arborant d'éclatantes couleurs civiles.

     

    Le risque calculé de Hitler

    Prenant un risque calculé, Hitler dépouilla les défenses occidentales dans l'idée de garantir une victoire écrasante à l'est. Ce qui restait à l'ouest du Rhin aurait à peine suffi à tenir à distance une attaque ennemie déterminée. Pendant que la bataille faisait rage en Pologne, 43 division allemandes diluées s'étiraient le long de la frontière allemande, du Danemark à la Suisse. En Sarre, le commandant de la Première armée allemande, le général Erwin von Witzleben, comptait 13 faibles divisions sous son commandement.

    La menace d'une offensive française agressive tourmentait quotidiennement le commandant de la Première armée. Witzleben, qui avait en fait pris sa retraite du service quelques années plus tôt, convenait à peine pour un commandement opérationnel. Le général s'était invariablement trouvé à des positions mornes, et le poste en Sarre n'y faisait pas exception. La défense de Witzleben était entravée par un manque de canons antichars et d'artillerie, et par le fait que ses divisions d'infanterie n'avaient qu'un faible niveau et étaient équipées de mitrailleuses datant de la Première guerre mondiale. Face à Witzleben se trouvaient 10 divisions françaises complètement équipées et ancrées dans les défenses formidables de la Ligne Maginot.


     
    Les raisons de la Ligne Maginot

    Portant le nom d'André Maginot, ancien combattant et ministre français de la guerre jusqu'à sa mort en 1932, la Ligne Maginot était la ligne de fortifications la plus élaborée et la plus chère jamais construite. Les Français avaient étudié la faisabilité d'une barrière défensive permanente face à l'Allemagne après la fin de la Première guerre mondiale, en prenant pour modèles les forteresses de Verdun. Le premier paiement du projet à 500 millions de dollars fut approuvé par le Parlement en 1929, et les travaux commencèrent en 1930.

    La construction de la ligne fortifiée n'était pas seulement le résultat du malaise d'après-guerre que ressentaient les Français pour leurs voisins orientaux. En 1928, l'Allemagne et sa faible armée de temps de paix limitée à 100'000 hommes, la Reichswehr, ne menaçait guère la France, ni n'aurait pu bouter les armées française, britannique et américaine hors de la Rhénanie occupée. Des préoccupations intérieures françaises incitèrent également à la militarisation de la région. En 1928, les départements français de l'Alsace et de la Lorraine – qui avaient été cédés à l'Allemagne par le traité de paix mettant un terme à la guerre franco-prussienne de 1870, et qui avaient été regagnés par la France suite au Traité de Versailles, à l'issue de la Première guerre mondiale – faisaient maintenant des pétitions pour devenir des régions autonomes.

    La pensée que ces départements riches en ressources – repris si récemment à un coût incroyable – puissent quitter à nouveau la France était intolérable. Maginot ordonna la construction de la ligne comme un rappel permanent et concret de l'allégeance régionale. En effet, l'essentiel de la ligne proposée longeait une région de France habitée par près d'un million d'Alsaciens germanophones.

    La Ligne Maginot compléta les fortifications existantes face à l'Allemagne et était particulièrement forte dans le corridor Saarbrücken – Metz, la route la plus directe pour Paris. En Alsace-Lorraine, la Ligne Maginot fut construite en 10 ans pour un coût de 323 millions de dollars. Les fortifications principales étaient achevées en 1935 et 300'000 soldats constituaient leur garnison.

     

    Le feu de la Ligne annulé

    Comme avec la plupart des dispositions défensives, la mentalité Maginot se concentra sur une barrière concrète comme couverture sécuritaire. La puissance de feu de la ligne était toutefois largement annulée, parce que les opérations en Allemagne mettaient les objectifs au-delà de la portée effective de l'artillerie lourde. Pour être de quelque utilité, les canons de Maginot auraient dû être avancés. Avec des expériences de la Première guerre mondiale comme la défense sanglante de Verdun en tête, les Français étaient peu disposés à quitter leurs fortifications pour des attaques irréfléchies sur la Ligne Siegfried.

    La construction du Westwall, ou de la Ligne Siegfried comme il était appelé par les Alliés, commença en 1936, après l'occupation militaire sans opposition de la Rhénanie par l'Allemagne. Les forts et casemates s'étendaient de la frontière suisse aux Pays-Bas. Les fortifications les plus lourdes furent construites autour de Saarbrücken, où certains avant-postes de la Ligne Maginot se trouvaient à seulement 100 mètres de la frontière allemande. En tant que centre de la défense, la cité industrielle de Saarbrücken avait une importance militaire particulière puisqu'elle constituait l'entrée de la trouée de Kaiserslautern, une route d'invasion traditionnelle. 

     
    Les trois ceintures du Westwall

    Réalisant l'importance de cette route à travers la Sarre, les Allemands avaient disposé leurs défenses du Westwall en profondeur, avec trois ceintures. La première ligne était répartie des deux côtés de la rivière Sarre et était constituée d'obstacles antichars, de bunkers et casemates dispersés et de champ de mines irrégulièrement organisés. Partout où cela était possible, les fortifications étaient construites dans des usines et fonderies existantes. La plus forte concentration de mines et de pièges se trouvaient sur cette ligne.

    La deuxième ceinture défensive entourait le Hunsrück, une région montagneuse s'étendant à l'est presque jusqu'au Rhin et formant une barrière naturelle vers le cœur de l'Allemagne. Dans ce terrain accidenté, le deuxième ceinture nécessitait moins d'obstacles antichars. La plus grande concentration de défenses individuelles était regroupée autours des routes, lignes ferroviaires et chemins menant dans les collines. La ceinture Hunsrück contenait plus de positions pour l'artillerie lourde et davantage de bunkers de commandement.

    La troisième ligne défensive du Westwall se trouvait 20 kilomètres plus à l'est et était formée de bunkers éparpillés et de positions renforcées autour des installations militaires existantes à Landstuhl et à Ramstein. Cette ligne constituait la dernière défense avant Kaiserslautern.

     

    L'Allemagne virtuellement sans défense

    Au contraire de sa coûteuse voisine française, la Ligne Siegfried n'était pas une ligne continue de forts. Bien qu'elle ait été conçue pour fournir des appuis de feu mutuels, il y avait trop de trous dans les positions défensives. En 1939, seuls 30% des défenses prévues étaient achevées. L'avancée des travaux était compliquée par le transfert de responsabilité de la Ligne Siegfried de l'armée au Ministère des Transports. Une grande part de la Ligne Siegfried avait été construite dans une telle hâte que de nombreux bunkers et casemates étaient disposés de manière incorrecte. Les unités du Corps des travailleurs nationaux-socialistes construisirent des bunkers et des fossés antichars sans retenue. La priorité était donnée aux secteurs situés près des routes principales, où elles bénéficiaient d'un accès facile. Durant une visite des forts à la frontière en 1938, Hitler fut impressionné par le nombre de casemates entourant visiblement les collines. En vérité, toutefois, des dizaines d'autres corridors naturels étaient négligés en faveur de ceux pouvant être vus par des fonctionnaires nazis de haut rang.

    Avant l'invasion de la Pologne, l'armée allemande avait peu de difficultés à fournir des soldats à la Ligne Siegfried puisque la défense de la frontière occidentale était prioritaire durant l'annexion de l'Autriche et de la Tchécoslovaquie. Les opérations en Pologne exigèrent cependant un effort substantiel et des unités de forteresse du Westwall furent absorbées par des unités régulières de l'armée. Les vides du Westwall laissaient la trouée de Kaiserslautern virtuellement sans défense.

     Le jour où l'armée française marcha sur l'Allemagne, le Corps expéditionnaire britannique débarquait en France. Bien que l'armée britannique ne soit pas tout à fait prête pour s'attaquer à la Wehrmacht, les dirigeant britanniques étaient avides d'une certaine forme d'action. Winston Churchill, alors à la tête de l'Amirauté britannique, proposa de mouiller des mines le long du Rhin. Mais les Français protestèrent, invoquant que les Allemands détruiraient les ponts sur la Seine en représailles. A la Chambre des communes britannique, il y avait une hésitation égale à mener la guerre de manière agressive. Lorsqu'il fut suggérer de bombarder la Forêt Noire pour entraîner des incendies incontrôlables en Allemagne, le Secrétaire d'Etat à l'Aviation Sir Kingsley Wood protesta, au motif que de telles attaques seraient perpétrées contre des propriétés privées. De plus, le Président du Conseil Edouard Daladier demanda à la Royal Air Force de s'abstenir de bombarder l'Allemagne. Cela devenait vite une guerre de gentlemen, les Allemands pour des raisons opérationnelles et les Français par timidité.

    Au contraire des machines produites à la chaîne de la Luftwaffe, les avions français étaient virtuellement assemblés à la main et en petit nombre, même s'ils restaient formidables en mains de pilotes expérimentés. L'aviation française avait l'interdiction de mener des missions en Allemagne malgré ses capacités. Si les chefs militaires français avaient réalisé que la Luftwaffe était complètement engagée à l'est, l'effort aérien anglo-français aurait pu être plus agressif. A l'ouest, la Luftwaffe se limitait à quelques chasseurs désuets, pour la plupart des biplans. La plus grande partie des chasseurs Messerschmitt Me-109 disponibles était basée au nord, afin de protéger la Ruhr industrielle et les installations navales. La majorité des activités aériennes durant cette période, qui devint connue sous le nom de " drôle de guerre ", consistait en des missions de reconnaissances allemandes. 

     
    Le retour en force de la Wehrmacht

    Le haut commandement allemand admit timidement l'évaluation de Hitler quant à la répugnance française. Quand le destin de la Pologne fut scellé, les troupes allemandes furent à même de faire la navette pour l'ouest. Le général von Hammerstein fut relevé de son commandement impotent sans cérémonie, et les garnisons du Westwall se détendirent.

    Le général allemand Siegfried Westphal a reconnu que la situation à l'ouest était dangereuse et a estimé que les Français auraient pu atteindre le Rhin en deux semaines s'ils avaient essayé. Le commandement français avait d'autres craintes. L'artillerie allemande était maintenant à portée des éléments avancés de la Ligne Maginot, et les avions de chasse de la Luftwaffe revenaient dans le ciel occidental. Les commandants français, adossés à la Ligne Maginot, se retirèrent obligeamment.

    Le 30 septembre, l'armée française reçut secrètement l'ordre de se replier sur la patrie, le mouvement devant être effectué de nuit. Le repli fut aussi lent que le fut l'avance. Ce ne fut pas avant le 17 octobre que les dernières forces françaises de couverture quittèrent le territoire allemand.

     

    La fin d'une opportunité unique

    La Première Armée allemande de Witzleben, renforcée par une division d'infanterie, déclencha le 16 octobre une attaque générale qui fit à peine plus que suivre quelques unités françaises d'arrière-garde. La contre-offensive dura jusqu'au 24 octobre. La Première Armée entra en France et fut ainsi la première force militaire allemande à le faire depuis août 1914. Les Allemands poursuivirent leur avance sans opposition et occupèrent une tranche de territoire français pendant 5 mois, jusqu'au blitzkrieg du 10 mai 1940 qui écrasa le pays. Un communiqué français annonça une forte attaque allemande, avec des rapports ultérieurs sur de sévères pertes ennemies. Les Allemands, en fait, ne dénombrèrent qu'un total de 198 morts dans cette action.

    Avec l'opportunité en 14 jours de contrecarrer le Troisième Reich s'acheva pour la France la seule offensive de la guerre, annonçant le début de la drôle de guerre. Pire, l'inexplicable léthargie française dans la Sarre condamna la France à la défaite 7 mois plus tard et garantit quatre années d'occupation nazie.


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