•  Depuis 1975, chaque lustre est marqué par le suicide ou les meurtres d'adolescents qui ont été influencés par les groupes rock, plus souvent des groupes dits "rock sataniques" --Richar Kasso, 17 ans, fan d'AC DC, torture et tue un jeune adepte du mouvement The Knights Of The Black Circle; en 1985, Sean Sellers massacre ses parents parce qu'il en a recu l'ordre de satan à partir d'un disque de Judas Priest. En 1994, le pacte de suicide de trois jeunes Québécois, fans de Kurt Cobain, le leader du groupe Nirvana, qui s'était lui-même donné la mort six mois plus tôt, fit les manchettes des médias. 

     "Un dernier trip", tiraient certains quotidiens. Récemment, c'est au tour de Marylin Manson d'être la cible des individus partageant les valeurs traditionnelles, des fondamentalistes chrétiens du côté américain aussi, qui s'acharnent dans cette lutte à n'en plus finir contre les groupes rock. Manson, comme tous les personnages typiques, choque par ses propos et ses paroles, ses chansons, ses entrevues. En août 1997, à Musique Plus, Manson déclarait à propos d'un adolescent qui s'était suicidé après s'être associé au chanteur: "Si un jeune se suicide pour mes chansons, et bien, ca fait un con de moins sur la terre". Pourtant, les adolescents qui passent à l'acte (suicide ou homicide) sous la dite influence de la musique rock sont des cas isolés, marginaux, encore plus si l'on tient compte au Québec des statistiques concernant le suicide entre génération (les années 1960 versus les années 1990): on est passé de 1 à 34 tentatives/jours chez les jeunes.

     



    Malheureusement, les médias et les antisatanistes ont tendance à citer ces cas marginaux comme des événements quotidiens, fréquents. Sans valoriser ces groupes de musique, sans les dénigrer aussi (c'est l'éternel débat entre l'art et la censure morale), chose certaine, les paroles de leurs chansons expriment la haine, la violence, le désespoir et offre des solutions plus ou moins morales. A l'occasion, les chansons deviennent de véritables pactes suicidaires, comme celles de "Seanson in the Abyss" (Slayer), "Sactifical Suicide" (Deicide). Etre identifié à un style de musique, à certains groupes, c'est accepter un type de culture; un langage, un mode de vie. Pour l'ensemble des groupes rock qui véhicule une image du satanisme, satan n'est souvent qu'un symbole. 


     Il est rebèle, anarchique, voire sympathique. Il n'est pas nécessaire, pour ces groupes, d'y croire ou d'être convaincu de l'existence de satan. Egalement, on observe que fréquemment, ces groupes font références à des personnages légendaires ou célèbrent pour les horreurs qu'ils ont pratiqué: Hitler, Alan Kardec, et plus proches, Charles Manson et Aleister Crowley. La musique dite "satanique" débuterait avec le blues américain, notamment en Louisianne. Les concerts de Dr. John se rapprochaient sérieusement de rites occultes et du vaudou. Au début des années 1970, on assiste d'une part à la montée des films Blacula et des films diaboliques, tels Exorciste et La Malédiction.


    Les groupes, qui ne donnent plus de simples prestations, mais des spectacles avec effets spéciaux, sont portés d'emblème à y intégrer le cinéma gore: momies, squelettes dans des costumes religieux, fumées pour les messes noires, décors de culte satanique; maquillages des musiciens; scènes horrifiantes ou bestiales, poulet égorgé, dégustation d'excréments, nudité, scènes de sodomie, guillotine, bébés pendus, brandissement de croix inversés, têtes de mort, etc. Ce sont les Black Widow, Ozzy Osbourne, Black Sabbath (sabbath noir), Alice Cooper, Juda's Priest, Led Zeppelin, AC/DC, Iron Maiden(leur nom est celui d'un instrument de torture contre les sorcières "La vierge de fer"). Au tournant des années 1990, les groupes se reconnaissant comme satanique ou gore connaissent un certain regain de vie: Morbid Angel, Deicid (qui veut dire "meurtre de Dieu"), King Diamond, Mercyful Fate, Sépultura, Slayer, Cannibal Corpse, Anthrax (nom d'une maladie du sysème nerveux). Ces groupes perpétuent une image de révolte et de crainte.


    Ils sont un objet de culte et de fascination pour plusieurs jeunes. Ces groupes surclassent de loin le satanisme des groupes appartenant aux années 1970. Côté costume et maquillage, Ace Frewley de Kiss est un minus comparé à Kind Diamond: croix de St-Pierre sur le front, ailes de chauves-souris sur les yeux et les pauières, sang qui dégouline en dessous des lèvres, pentacle, bagues en forme de gargouilles et de démons. Côté spectacle, ceux de Cooper sont de la pacotille comparés aux performance de Gwar: scènes obscènes, têtes mutilés, décapitation, perversions sexuelles, excéments nécrophagie et nécrophilie. Leur troisième album, America Must Be Destroyed s'est vendu à plus de 100 000 copies. Gwar, c'est le rock dépavré. Leur film, Phallus and Wonderland, montre des scènes écoeurantes, mais théâtrales: une femme se fait couper les seins en deux, des enfants mangent des céréales mélangés à du sperme, un curé se fait empaler avec un crucifix et se fait tripotter dans l'anus quelques secondes...

     


    Malgré tout, de l'avis de plusieurs experts, ce qui est le plus malveillant pour les adolescents est plutôt le message final de ces chansons. A force de se faire traiter tous les jours de "pas bon", de "rejet", d"imbécile"... par ses proches et ses pairs, un adolescent perd le peu d'estime de soi qu'il possédait. C'est semblable avec la musique: à écouter sans cesse les gens clamer tout haut que le monde est dégueulasse, merdique; que la mort d'un individu est un bien pour l'ensemble de la société, que les parents briment la liberté et qu'il faut les éliminer, on fini par y croire, à passer à l'action. En faveur des adolescent, disons que l'écoute de la musique est présentement leur loisirs préféré. 

    La musique est également une des activités qui les démarquent le plus de leurs parents ainsi que des autres générations. En Amérique, depuis un demi-siècle, la musique rock est le signe d'une contre-culture. Elle procure à l'adolescence une identité provisoire: elle se veut le signe d'une quête de sens ainsi que celui d'une contestation de l'autorité en place. En réalité, les adolescents écoutent la musique que leurs parents détestent ou n'aiment pas entendre.

    Le fait qu'ils sont amenés à écouter leur musique à haut volume doit être interprété soit comme une réaction face à l'autorité, soit une facon de s'éloigner temporairement des conflits qu'ils vivent; soit une facon de défouler leur agressivité. L'ensemble des groupes dits "sataniques" ont compris cela. Ils véhiculent une image du satanisme parce que le personnage est un symbole puissant, rebelle, anarchique, voire sympathique. Il n'est pas nécessaire pour ces groupes d'y croire ou d'être convaincu de l'existence de satan. Essentiellement, satan est une affaire de marketing. 

    Leurs allusions, entre-mêlées d'un amalgame de références au mal, ne sont pas une pure coïncidence, mais quelque chose de volontaire en terme de rentabilité financière. N'empêche que bon nombre d'adolescents tombent en admiration, vénère ces groupes ou ces chanteurs et, de plus en plus, à de très bas âges. Ils sont fortement attirés par le charisme et les supposés exploîts du vedettariat satanique (Manson n'a plus le droit d'aller dans une église, Zappa a fait caca sur la scène et a mangé une partie du tas, etc.), cherchent à copier les rituels imaginaires relatés dans les chanons ou en spectacle. Aidés en plus du cinéma et de la littérature, certains adolescents finissent par former de petits groupes sataniques. Moins articulés qu'une véritable secte, ces groupes n'en demeurent pas moins dangereux. L'adolescence se caractérise par l'expérience davantage que par l'étude et la connaissance. Ils interprètent, à leur facon, les textes des chansons, s'inventent des rituels à partir de sacrifices d'animaux, etc., et ne sont guère à l'abri de s'adonner à des actes sanguinaires qui les dépassents.

     


    Pour les défenseurs du rock et de la liberté d'expression, ces groupes ne font que du spectacle. Black Sabbath, King Diamond, Sépultura, Slayer, Canibal Corpse sont beaucoup plus une parodie de la religion officielle (le christianisme), une idolâtrie aux biens matériels et au sexe; Alice Cooper, Gwar ou Marilyn Manson, un produit de vente pour le sang et la morbidité, la révolte contre le système et les valeurs traditionnelles de l'empire et du mythe américain. Pour les mouvements anti-rock, pour les antisatanistes, ces groupes savent très bien de quoi ils parlent. Les anti-satanistes considèrent d'ailleurs la chanson "Sympathy for the devil" (1968) des Rolling Stones, les assises de tous les groupes du genre.


    "Satan est le rebelle par excellence contre l'autorité, sous toutes les formes qu'elle se présente dans la société: parentale, patronale, académique, culturelle et religieuse". Satan est le symbole de l'anarchie et du despotisme. Cependant, leur discours avertisseur, omniprésent dans les médias, a l'effet contraire de l'intention et ne fait que mousser la montée du satanisme. Pour les antisatanistes, satan trouve une de ses expressions artistiques dans le rock. Le Prince des ténèbres séduit les jeunes par cette musique et les convertit à l'adoration des forces du mal: drogue, alcool, délinquance, négation de la famille et de l'autoité, violence et sexe. Certains fondamentalistes font remonter cette musique du diable aussi loin que les première sociétés traditionnelles animistes avec le beat des "tam, tam" et les danses érotico-magiques d'Afrique.

     Fait certain, sur le continent, pour les antisatanistes la musique du diable commence dans les années 1930, avec le Rhythm and Blues: des chansons qui contiennent des références précises de la sorcellerie et de la magie noire. Selon une légende populaire, Robert Johnson, un noir du Mississipi et musicien de blues, aurait conclu un pacte avec le diable à la croisée des chemins. Un de ses premiers succès, intitulé "Crossroads", relate ce soi-disant pacte. Afin de freiner la poussée des groupes sataniques, des individus ont créé, en 1985, le Parents Music Resource Center(PMRC).


    Le mouvement comprend plusieurs personnalités des milieux politiques, des sénateurs et Susan Baker, femme du Secrétaire du Trésor de l'époque: James Baker. Le PMRC prêche des motifs sincères, sans toutefois les justifier. Son principal objectif est surtout d'éduquer les parents et les jeunes de l'influence possible de la musique sur le sexe, la violence, la drogue et les cultes sataniques. Les fondamentalistes chrétiens soutiennent que la musique rock est extrêmement dangereuse pour les jeunes. Selon eux, le mot "rockand rool" signifie: "balancer, rouler" et se veut le mouvement deshanches lors des relations sexuelles, ou encore, le retour des danses paganistes chez les sociétés traditionnelles. 

    On regroupe en deux catégories les dommages causés par la musique rock: les incidences physiologiques (instabilité mentale, déficience de l'ouie --la musique est écouté souvent à plus de 90 décibels) et les incidences psychologiques (modification des réactions émotives telle la frustration et la violence incontrôlée). Tout comme les antisatanistes, les fondamentalistes croient que le rock provoque de graves conséquences sociales. Les nombreuses émeutes, dans presque toutes les villes et les pays, lors des concerts rock, en sont la preuve indéniable. Après ou avant les spectacles, les jeunes s'adonnent à des actes de vandalismes et de violences démesurés. 

    Il y a des arrestations, il y a des blessures, des meurtres à l'occasion, des overdoses (la drogue et l'alcool affluent de toute part). Et, comme si toutes ses accusations ne suffisaient pas, lors des spectacles rock, l'aspect "délire, frénésie et hystérie" qui s'empare des spectateurs sont digne des exorcismes. Leur fanatisme les amènent à revendiquer des accusations farfelues, insoutenables. Par exemple, que le rock crée un dommage à l'être humain lorsqu'il est écouté plus de trois heures. Ou encore, que les disques de musique rock contiennent des messages qu'ils qualifient par méconnaissance de subliminaux. Pour les antisatanistes, les groupes rock enregistrent des paroles à l'envers afin d'hypnotiser les adolescents, de leur faire un lavage de cerveau, de créer une autosuggestion. En faisant jouer à rebours certains disques rock, on découvre des inversions surprenantes: "Another One Bites the Dust" donnerait "Start to smoke marijuana"). Aux Etats-Unis, ces mouvements extrêmiste sont davantage répandus. Mentionnons le controveré Steve Peters(+6) et son mouvement Truth About Rock. 

     Il a notamment publié les livres What About Christian Rock et What Devil's Wrong Rock Music et de nombreux "tracts" (Sexand Rock'n'Roll, Suicide and Rock'n'Roll) et des documentaires (Satanism and Rock's Fatal Flams). Ces mouvements ont évidemment leur site sur Internet. Commercial ou non, une majorité des groupes de musique rock satanique vont profaner le christianisme, le catholicisme tout en faisant l'éloge du satanisme. Les paroles chantés par ces groupes sont révoltantse: paroles désobligeantes, profanantes, qui incitent les jeunes à la révolte, à la violence, au suicide et au meurtre .On retrouve sur les pochettes des phrases du genre: "Je veux vivre pour Satan", "Je désire que le Seigneur Jésus plie le genou devant Satan", "Un merci à toutes les personnes qui sont de vrais serviteurs de Satan". S'il est difficile d'affirmer jusqu'à quel point ces groupes sont sérieux, on peut vivement contester l'image destructrice (de soi et des autres) qu'ils professent comme un commandement divin auprès de la clientèle vulnérable des adolescents. Si ces groupes ne sont pas des exemples de mouvement satanique, ils sont certes des musiciens aux mauvais goûts.

     Finalement, il faut éviter d'associer les adolescents qui écoutent ce genre de musique à des dévots de satan. La plupart n'ont pas la moindre idée de la portée occulte des paroles chantées, des symboles imprimés sur leur t-shirt (à titre d'exemple, le sigle "zoso" sur certains t-shirt de Led Zeppelin et qui signifie en langage satanique "fournication"). Il serait plus juste d'affirmer que, pour la plupart des individus, ce type de rock est la description des forces chaotiques qu'ils ressentent à l'adolescence. Ils recherchent la révolte et le désordre, ils sont en quête d'une identité symbolique, provisoire, forte et intéressante, davantage qu'un pacte satanique. En terminant, mentionnons qu'à l'opposé des groupes sataniques, le milieu des années 1980 a favorisé l'émergence de groupes rock chrétien. Leurs chansons, au contenu biblique, véhiculent les valeurs évangéliques, des messages d'amour, de pardon. Le groupe Believer figure parmi les plus connus. Dans la même lignée, en Estrie, le groupe Freedom Force se veut le porte parole du Dieu miséricordieux. Ex-prisonniers, les membres prêchent l'amour, le pardon, la compréhension. On présente le Christ comme la lumière de la vie et la vérité absolue.


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