• Le mythe des sirènes est quasi indestructible, l’iconographie antique les représente comme des femmes à queue de poisson tenant des instruments de musique ou des oiseaux à visage et seins de femme. Sur les monuments funéraires, elles figuraient des anges de la mort chantant au son de la lyre tout en ayant des intentions érotiques à l’égard du héros décédé. Plusieurs auteurs anciens les ont citées : Aristote, Pline, Ovide, etc. et les bestiaires médiévaux les décrivent comme des femmes " de la tête aux cuisses " et poissons de " là jusqu’en bas avec des griffes et des ailes ". Elles ont laissé à la postérité leur image gravée dans la pierre des stèles, tombeaux ou des églises romanes où elles personnifient l’âme des morts comme dans l’Egypte ancienne, on les invoquait au moment de la mort.


    Il reste quelques vases grecs qui racontent les aventures d'Ulysse : sur ceux qui sont antérieurs au IIIe siècle avant Jésus Christ, les sirènes apparaissent comme des oiseaux à tête de femme. Par la suite, elles acquièrent des bras, puis une poitrine humaine, attributs peut-être seulement esthétiques, même s'ils constituent des éléments supplémentaires de séduction, puisque les sirènes sont désormais représentées jouant d'un instrument, flûte ou cithare. Ainsi, elles s'humanisent au cours de l'Antiquité pour devenir des femmes ailées chez les Romains et les Etrusques, comme en témoigne la magnifique mosaïque représentant le bateau d'Ulysse, trouvée à Dougga.

     

    Pour les Scandinaves, elle est un monstre redoutable appelé "Margygr", la " géante de mer ". L’œuvre norvégienne le " Miroir royal " la décrit comme une avenante créature ressemblant à " une femme en haut de la ceinture, car ce monstre avait de gros mamelons sur la poitrine, comme une femme, de longs bras et une longue chevelure, et son cou et sa tête étaient en tout formés comme un être humain ".

     
    Ce monstre paraissait grand, avec un visage terrible, un front pointu, des yeux larges, une grande bouche et des joues ridées. Au VIIIe siècle, le moine anglais Aldhelm de Malmesbury les décrit comme des vierges à queue de poisson couverte d'écailles. Ces deux représentations vont cohabiter jusqu'au XVe siècle où les sirènes volantes laissent définitivement la place à une jolie femme aux longs cheveux et à queue de poisson. A cette époque, le naturaliste allemand Johannes de Cuba les fait vivre dans des gouffres au fond des mers ; " on les trouve souvent dans les mers et parfois dans les rivières ", dit de son côté l'écrivain flamand Jacob Van Maerlant ; en revanche, dans la mythologie grecque, ces démons habitent une île du Ponant près de l'île de la magicienne Circée. Ces filles de la mer traînent une triste réputation de dévoreuses d'homme, attirant leurs victimes par des chants mélodieux ou une apparence séduisante, voire les deux. Ces redoutables séductrices peuvent même être de simples jeunes femmes sans queue de poisson vivant dans la mer. Les Anglais les appellent alors Siren plutôt que Mairmaid.

     

    D'illustres navigateurs ont dit avoir rencontré des sirènes : Christophe Colomb, en 1493, en aurait vu trois près des côtes de Saint- Domingue, " mais elles n'étaient pas aussi belles qu'on les décrit... " Un avis qui n'est pas partagé par les marins d'un navire américain qui ont observé, vers 1850, près des îles Sandwich ( Hawaii ), une sirène " d'une grande beauté qui ne cédait en rien aux plus belles femmes ". Ces sirènes sont certainement des mammifères marins, tels les lamantins et les dugongs, qui vivent dans les eaux peu profondes des archipels, des lagunes et estuaires.

     

    En 1403, près d'Edam en Hollande, un " spécimen " a été capturé par deux jeunes filles. Il s'agissait d'une femme, trouvée nue dans l'eau et ne parlant aucune langue connue, qui fut surnommée la " sirène d'Edam ".

    Des pastiches de sirène " desséchées " ont été fabriqués dès le XVIe siècle, et exposés dans les foires et les musées. Mais c'est surtout au XIXe siècle qu'ils ont attiré les foules. Ces monstres hideux étaient fabriqués au Japon, en Inde ou en Chine. Le haut du corps est constitué d'un buste d'orang-outan ou de guenon. La queue est celle d'un gros poisson. Quand au XVIIe siècle, à Leyde, un certain Pavio disséqua une sirène en présence du célèbre médecin Joannes de Laet, apportant un certain crédit scientifique à l'animal fabuleux. La tête et la poitrine étaient humaines mais, du nombril au pied, l'être était informe et sans queue.


    Créée en 1835, par l'écrivain danois Hans Christian Andersen, la légende moderne de la sirène continue de faire des vagues, elle n’est plus la terrible tentatrice mais devient une héroïne romantique, qui cherche l’amour, telle Ondine qui offre son âme à l’homme qui voudra bien l’épouser. Le dessin animé de Walt Disney, la Petite Sirène (1989), reprend des éléments issus de la culture populaire et du conte d'Andersen.


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