• La licorne médiévale est un symbole de puissance, qu'exprime essentiellement sa corne, mais aussi de faste et de pureté. D'après une vieille légende de l'Inde, la licorne est douée d'un pouvoir magique. Sa corne sépare les eaux polluées, détecte les poisons et ne peut être touchée impunément que par une vierge . Devenue au Moyen âge symbole de pureté, elle fut adoptée dans l'héraldique, et figure dans de nombreuses armes, celles les plus connues sont celles d'Angleterre. C'est un animal de bon augure. La licorne concourt à la justice royale, en frappant les coupables de sa corne.

     La licorne symbolise aussi, avec sa corne unique au milieu du front, comme une flèche spirituelle, un rayon solaire ou l'épée de Dieu, la révélation divine, la pénétration du divin dans la créature. Elle combat contre l'éclipse de soleil qu'elle dévore. 

     

    Elle représente dans l'iconographie chrétienne la Vierge fécondée par l'Esprit Saint. Elle est le symbole de la fécondité spirituelle et aussi le symbole de la virginité physique.  Elle était devenue au Moyen âge la représentation de l'incarnation du Verbe de Dieu dans le sein de la Vierge Marie. La licorne devient par extension la figuration du christ, en ce qu'il opère des miracles et se sacrifie pour les hommes.

    Dans les conceptions médiévales de l'amour courtois, la licorne est douée du mystérieux pouvoir de déceler l'impur, voire même la moindre altération dans l'éclat du diamant.


    Ces êtres renoncent à l'amour par fidélité à l'amour. Le renoncement s'oppose à la possession, la survivance de la jeune fille à la révélation de la femme. Le mythe de la licorne est celui qui fascine le plus les cœurs corrompus. Elle est le symbole de la pureté agissante, sublimant la vie charnelle.



    Le symbolisme de la purification des eaux par la licorne a été repris maintes fois en peinture ou en gravure.

    Sa corne unique a pu été comparée à une verge frontale, la licorne transcende néanmoins la sexualité. Des alchimistes voyaient en elle une image de l'hermaphrodite. Si en alchimie, la licorne symbolise le mercure, la Dame de la célèbre tapisserie est assimilée au Sel philosophal.

    La corne aux vertus si prisée des princes, notamment comme contre-poison, a longtemps fait   l'objet d'une contrefaçon habile. En effet, la corne de Narval, mamifère marin aujourd'hui bien connu, lui était substituée, et sa forme spiralée renforcait encore l'impression d'authenticité. Combien d'utilisateurs auront été cependant empoisonnés ?

     


    On retrouve trace de la croyance aux licornes jusqu'au milieu du XVIIè siècle. Ainsi, Jan Van Kessel le vieux (1626-1679) peintre anversois connu pour ses représentations animalières et ses panneaux naturalistes sur les continents, figure deux licornes et un monocéros au milieu de fauves sur la toute première vue de ses panneaux consacrés à l'Amérique, (Buenos Aires). Cette oeuvre est datée vers 1666, le moyen-age était bien loin, alors comment a-t-il pu imaginer cette créature et la situer dans le nouveau monde ? Son inspiration a probablement été puisée dans l'Historiae Naturalis du néerlandais Jan Jonston (1603-1675). En effet, ces trois créatures sont très proches des dessins du tome consacré aux quadupèdes de Jonston édité vers 1650-1652. 

    D'autres animaux représentés par Van Kessel sont également très similaires aux planches de Jonston, y compris par leurs positions comme dans le panneau appellé Les Animaux, daté vers 1660 et dans lequel la vue des trois créatures est déjà présente, à l'identique, sur la troisième ligne des quarantes vues.

    Sur sa dixième planche de son tome des quadrupèdes, Jan Jonston représente des unicornes avec en paysage de fond, une scene de la célébre chasse à la licorne, qui se présente à une vierge assise. La onzième planche montre un onagre (onager aldro - wald efel) ainsi que deux unicornes. Ces deux dernières créatures semblent avoir été exactement reprises dans la peinture de Van Kessel consacrée à l'asie, notamment le panneau latéral sur le Suakin, où elles se chargent mutuellement;L'onagre de Jonston est repris dans la vue de Buenos Aires.

    Le fait que des créatures imaginaires comme les dragons, les hydres, les licornes ou les basilics soient présents dans une histoire naturelle, rédigée en latin, avait sans doute du impressionner le public et tous les contemporains de Jan Jonston. Les clients de Van Kessel, amateurs de cabinets de curiosité ou de décors à la mode, goutaient plus au caractère riche, détaillé et coloré de ses magnifiques miniatures qu'à la véracité de l'existence des spécimens représentés.


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